L’ennemi se trouve bien souvent à la vue de tous [Adalynn x James]

L’infirmière était apparue au sein de l’Académie en pleine semaine, quelques temps après tout autre membre du personnel. Comme une réelle opportuniste, l’infirmière principale de ces lieux, destinée elle le savait à s’occuper aussi bien de vampires que d’humains, avait décidé de se faire discrète et de profiter de l’effervescence provoquée par la rentrée du printemps pour passer inaperçue. Seuls certains privilégiés avaient pu brièvement l’apercevoir au détour d’un couloir ou d’une allée, sans parfois même soupçonner qu’elle était parmi les membres du personnel indispensable à tout établissement digne de ce nom. L’académie avait longtemps manqué d’infirmière, la dernière en date ayant mystérieusement démissionné pour raisons a priori familiale ; cependant l’arrivée d’Adalynn, bien que désirée des personnes les plus fragiles de cet établissement, n’avait pas créé le moindre remous.
       Celle qui se faisait aisément passer pour une jeune femme ne s’était montrée que rapidement au directeur, comme n’importe quel chef d’établissement l’aurait souhaité, davantage par soucis de ne pas atteindre à sa propre image en se mettant de suite en mauvaise posture. Il lui fallait s’attirer un minimum la confiance de ceux avec qui elle travaillerait durant les quelques mois à venir, si ce n’est plus de temps encore.
        Rien ne semblait dans ces premiers jours atteindre au bon déroulement de ses ambitions à venir, mis à part la taille et l’allure labyrinthique des couloirs de l’Académie Cross. Peu d’élèves étaient venus à elle, faute de trouver ce local excentré. Bien que spacieuse et idéalement placée pour qu’Adalynn ait un plein regard sur la cour, l’infirmerie était particulièrement isolée de toute salle de cours, loin du réfectoire et de la salle des professeurs… Seule sa proximité avec les internats était acceptable, si l’on pouvait dire cela ainsi. Rien ne semblait réellement préjudiciable et profitable à sa mission, et c’était aussi bien un avantage qu’un inconvénient.
        Après de si longs jours de mise à l’écart ressentie, il avait fallu ruser. L’infirmière devait bien, à un moment donné, se trouver quelque patient pour approcher celui qu’elle avait déjà aperçu de loin. James Baskerville, sa cible numéro un. Il respirait le mensonge et la discrétion, lui aussi. Comme un être reclu, cachant son mensonge et ses crimes en s’affichant à la vue de tous, se plaçant ainsi au-delà de tout soupçon grâce à la naïveté de son entourage. Qui eut cru que se cachait derrière un banal professeur de la Day Class un réel chasseur divergent, ayant tué de sang froid un level A ? Certes, ce meurtre les avait tous débarrassé de l’adversaire Lord Alistair, cependant les règles étaient les règles. Adalynn peinait à tolérer ce genre d’écart depuis qu’elle ait failli elle-même en payer le prix. Il fallait qu’elle trouve un moyen de l’aborder.
      Passant devant la salle de classe du fameux professeur, la jeune femme remarqua aisément les quelques élèves rébarbatifs se tenant la tête de désespoir, attendant impatiemment la sonnerie. D’un simple coup d’oeil, elle avait du repérer une cible parmi ces jeunes gens, et porta son attention sur une demoiselle à l’allure fragile, faisant comble du hasard parti de cette poignée d’élève ayant trouvé le chemin de l’infirmerie dans les derniers jours. Elle souffrait du dos de manière chronique, c’était là un atout ; elle avait décidé de retourner lentement, discrètement vers son local, usant de quelque sortilège lié à ses pouvoirs vampiriques afin de déclencher chez la jeune demoiselle une douleur paralysante. James ne pourrait déroger à ses fonctions de professeurs, et viendrait chercher l’infirmière de lui-même.

James avait déjà repris les cours depuis quelques jours après une absence et une rémission lente. Il se remettait cependant assez bien de son opération fortuite bien que la fatigue était encore présente et qu'il lui était impératif de prendre les comprimés prescrits par le médecin qui avait exercé la greffe. Les cachets étaient malheureusement aussi louches que celui qui les avait conseillé au chasseur. Par le plus grand des bonheur, à moins que ce ne soit en raison de sa constitution plus solide que les humains normaux, le Baskerville avait le privilège de ne pas souffrir d'effets secondaires indésirables outre un épuisement évident et quelques nausées imprévisibles. La mauvaise humeur née de son état s'était rapidement répercutée sur les élèves qui avaient rapidement compris que provoquer l'anglais était une très mauvaise idée. Quelques têtes rebelles avaient essayé de profiter de sa faiblesse pour arriver en retard, mais ils les foudres de l'enseignant s'étaient abattue sur eux avant qu'ils n'aient la possibilité de faire un dernier adieu à la soirée libre qui les attendait... puisque James s'était fait un plaisir de leur donner quelques recherches supplémentaires afin de combler leur ennui.
La journée s'annonçait paisible cette fois, aucun esprit brûlant n'avait eut l'envie de tester la patience de l'historien. Il avait débuté son cours dans une ambiance plutôt bonne, les élèves se révélant étrangement intéressés par l'époque victorienne. Le Baskerville s'était donc fait l'idée de profiter de cette accalmie quand une main c'était levée, appartenant à une prénommée Kumiko. Son amie et voisine de table semblait souffrir de douleurs dorsales, recroquevillée sur le banc de l'amphithéâtre. Si il n'avait pas eut un minimum de respect, l'homme aurait sans doute soupiré de dépit mais savait que cette gamine n'y était pour rien et ne faisait assurément pas de comédie. Il avait pensé dans un premier temps à envoyer un élève chercher une infirmière mais il ne faisait pas assez confiance à l'un d'eux pour tenter le diable. Il y avait bien cette sangsue de délégué qui saurait faire son travail correctement malheureusement l'infirmerie était loin et l'adolescent ne remportait pas la palme de vitesse.

-Je vais chercher l'infirmière, je reviens immédiatement. Que personne ne s'avise d'en profiter ou je saurai le faire payer, j'ai quelques interrogations surprises de faîtes et des DM qui ne demandent qu'à sortir.

Cela lui rajouterait des copies mais au moins la menace allait lui permettre de tenir cette classe en laisse.
Le trentenaire d'apparence quitta alors son bureau et se rendit en hâte dans les couloirs, n'hésitant pas à opter pour un pas rapide afin de parvenir plus rapidement à l'infirmerie. Quelle idiotie avait eut Kaien de la placer dans un bâtiment si éloigné... Il fallut cinq bonnes minutes au chasseur pour s'y rendre et ainsi entrer dans les locaux pour ensuite taper à la porte soigneusement fermée de l'assistante médicale du campus.
Il ne l'avait pour le moment encore jamais rencontré directement, juste aperçue, mais cela ne lui avait guère manqué.

Entendant avec délectation les pas agités de James s’approcher de l’infirmerie, Adalynn se sentit sourire malgré elle et camoufla idéalement son aura vampirique. Comme toute personne exerçant son métier, il lui fallut faire illusion, si bien qu’elle se posa derrière son bureau, mima de travailler sur son ordinateur avant de se stopper net une fois le toquement de James raisonnant à ses oreilles.

-Une minute, demanda-t-elle.

Prenant volontairement le temps de rédiger une dernière phrase, la jeune femme se lea enfin de son siège quand James ouvrit la porte de lui même, probablement pressé. Mais elle n’était pas censée savoir ce qui se passait. Alors appuyée sur son bureau dans un geste d’appui pour relever son corps, il lui fallut affronter avec joie et pour la première fois le regard de cet homme qu’elle devait mettre en déroute.

-Bonjour, souffla-t-elle d’un ton faussement perplexe. Un problème ?

-Une minute, demanda-t-elle. [/b]

Si une chose était commune à toute les infirmières du monde, c'était sans doute leur mauvaise manie de faire attendre les gens alors que la situation était urgente. Cette femme ne différait donc pas de ses prédécesseurs, aussi polyvalente soit-elle pour s'occuper de vampires et d'humains à la fois. Cela supposait une bonne connaissance en anatomie des deux espèces mais en cet instant, le Baskerville ou plutôt monsieur Sorel s'en contrefichait totalement. Il attendit quelques secondes, agacé par cette voix féminine qui laissait supposer une personnalité apathique et molle comme la précédente assistante médicale de ce lycée. Il n'eut cependant pas la volonté de prolonger un peu plus sa patience et se permit d'ouvrir, tombant nez à nez sur une délicieuse créature, bien loin de ses suppositions sur une possible Gertrude de 45 ans.

-Bonjour, souffla-t-elle d’un ton faussement perplexe. Un problème ? [/quote]

Le chasseur se montra un instant dubitatif. Elle semblait jeune au premier abord et surtout n'appartenait qu'à un modeste level C de premier abord. Un petit génie parmi la classe majoritaire des vampires mais aussi celle dont on parlait le moins ?

-Une élève qui est presque paralysée, en seconde A. Yuka Hiromi, vous devriez avoir son dossier dans l'ordinateur, c'est un problème chronique. avait-il répliqué avec hâte sans lui renvoyer sa salutation polie.

Tandis qu’elle observait James, alors en plein discours, l’infirmière prit un air de plus en plus attentif. Il parlait vite.

-Une élève qui est presque paralysée, en seconde A. Yuka Hiromi, vous devriez avoir son dossier dans l'ordinateur, c'est un problème chronique. 

Le sentir aussi agité la fit sourire en son fort intérieur. Elle le rencontrait enfin, James Baskerville, cet homme si spécial et original dans toute son asociabilité affichée. Il semblait bien peu fréquentable et ce manque de politesse n’avait fait qu’agacer un peu plus la demoiselle, qui s’était au moins efforcée de faire cet effort pour sa couverture.

-Nul besoin de regarder, je la connais, souffla-t-elle un peu plus sèchement en se hâtant.

Filant dans une petite pièce avoisinante, dont la porte était adjacente à sa petite bibliothèque encore bien vide, Adalynn sortit un fauteuil roulant tout ce qu’il y a de plus banal afin de venir secourir la jeune fille en détresse. Elle prit en plus de cela quelques affaires médicale, sachant la fameuse Hiromi Yuka interne et destinée à souffrir encore longtemps si elle ne faisait rien. L’avantage pour cete académie, c’était bien que l’infirmière était également médecin de vocation, et se prendrait la liberté d’agir en conséquence en cas de besoin comme c’était actuellement le cas.

-Vous étiez en plein cour ou bien vous veniez de terminer ? Il va falloir faire sortir les élèves, prévint-elle.

Sans tarder davantage, replaçant ses clés dans sa poche avec précaution, Adalynn se permit de pousser doucement James en dehors de la pièce et de le doubler le temps d’un couloir, attendant ensuite qu’il la guide vers la malade dont elle n’était pas censé savoir la position.

-Nul besoin de regarder, je la connais

Le ton de la jeune femme avait quelque chose de sec qui n'avait guère échappé au professeur. Finalement malgré sa beauté naturelle, cette créature était aussi rêche que le grattoir d'une éponge, c'était dommage. Elle avait pourtant un bon potentiel...

-Vous étiez en plein cour ou bien vous veniez de terminer ? Il va falloir faire sortir les élèves

Faire évacuer la salle de classe dans son entièreté ? Elle pensait sincèrement le faire ? Il allait sans doute devoir appeler les surveillants pour que ces derniers puissent gérer les élèves en l'absence de l'enseignant. Car aussi studieux et de bonne naissance étaient les enfants scolarisés dans cette prestigieuse académie, ils n'en restaient pas moins des adolescents chahuteurs. Dans le lot, il y avait toujours une poignée de quelques farceurs qui ne pouvaient s'empêcher de saisir l'occasion pour se mettre en avant et exciter les jeunes esprits rebelles des autres.

-En plein cours, il va nous falloir appeler la vie scolaire pour que les surveillants puissent s'occuper des élèves car je suppose que vous aurez besoin d'aide?

Voyant l’air presque déconfit du Baskerville, Adalynn eut bien du mal à contenir un mince sourire amusé. Elle venait de clairement marquer son esprit avec cette dernière déclaration et s’en trouvait révie, bien qu’une autre idée germa aussitôt dans son esprit. Elle avait probablement abusé dans ses mots, avait mal formulé sa requête : si la demoiselle ne parvenait pas à se mouvoir, oui, il faudrait évacuer, mais autrement il n’en serait pas question.
L’infirmière se rappela par ailleurs de quelques détails vis-à-vis de la main de ce cher James. La rumeur avait vite circulé parmi les hunter qu’il était devenu manchot depuis de bien longues années déjà, or il portait aujourd’hui un gant de cuir, et semblait mouvoir cette main manquante comme n’importe quel membre de chair… Cela la taraudait tellement sur l’instant que de nouvelles exigences lui vinrent.

-En plein cours, il va nous falloir appeler la vie scolaire pour que les surveillants puissent s'occuper des élèves car je suppose que vous aurez besoin d'aide?
-Je me suis mal exprimée, veuillez m’excuser, s’efforça-t-elle de sourire. J’aurai besoin d’aide en effet, je n’aurait pas la force de la porter pour la poser sur ce fauteuil si jamais elle ne se lève pas d’elle-même. Il faudra que vous la portiez auquel cas, mais seulement si elle le supporte… Je pourrai alors l’évacuer sans soucis. Cependant si la chose est impossible, vous n’aurez qu’à donner quartier libre à vos élèves, car il me faudra tenter de la soulager ; dans le pire des cas, il nous faudra même appeler une ambulance car mes compétences s’arrêteront là.

S’il avait une main mécanique, il rechignerait sûrement à la porter de peur que ce membre artificiel ne s’arrache ?

-Je me suis mal exprimée, veuillez m’excuser,J’aurai besoin d’aide en effet, je n’aurait pas la force de la porter pour la poser sur ce fauteuil si jamais elle ne se lève pas d’elle-même. Il faudra que vous la portiez auquel cas, mais seulement si elle le supporte… Je pourrai alors l’évacuer sans soucis. Cependant si la chose est impossible, vous n’aurez qu’à donner quartier libre à vos élèves, car il me faudra tenter de la soulager ; dans le pire des cas, il nous faudra même appeler une ambulance car mes compétences s’arrêteront là.

Aussi égoïste cette pensée était-elle, James préférait largement l'ambulance. Les choses seraient ainsi moins complexe, ou du moins peu dangereuses pour lui. Car effectivement, il n'était encore guère accoutumé à sa nouvelle main, malgré tous ses efforts nocturnes pour la maîtriser. Malheureusement même avec tout le talent et la dextérité possible, cette main demeurait un prototype certes commercialisé pour les besoins des hunters mais toujours incertain. Qu'est-ce qui prouvait au Baskerville que le membre artificiel n'allait pas lâcher à cause d'un poids trop lourd ? Soulever une tasse de café était une chose, mais lui faire supporter le poids d'un être humain en était une autre.

-Nous improviserons bien selon sur le moment. Pour l'instant je ne suis pas en mesure de juger son état avec autant de pertinence que vous.

Le professeur était présentement trop fatigué pour se rendre compte d'une chose évidente : en tant que vampire, l'infirmière n'aurait aucun mal à soulever cette adolescente humaine par ses propres moyens. Il était vrai néanmoins que la chose paraîtrait étrange devant des yeux ignorants tels que ceux des pompiers ou des autres élèves qui ignoraient l'existence des noctambules...

-Bien. Allons-y.

Les nerfs à vifs de James, rendus si tendus par la fatigue, ne lui permettaient pas de faire preuve d'une patience exemple si bien qu'il n'avait aucun remord à presser cette gente dame.